vendredi 18 mars 2011

J'aime Anne Marie Lecompte (mais je n'aime pas les nuits blanches)

Minuit. Je ne dors toujours pas. Je suis impassible et j’attends que le sommeil me trouve. Je crois n’avoir jamais été aussi bien cachée.
1h 15. Je soupire, résignée. Mon cerveau n’est pas du tout indulgent avec moi. Il m’en fait voir de toutes les couleurs. Je repasse en boucle les moments forts de la semaine. Le noir prédomine, car j’en broie et je rumine.
1 h 30. Je me sens comme un gigot sur broche qui tourne sur lui-même. Chéri ouvre l’œil un tantinet, dérangé par la turbine qui échauffe l’édredon. Il me tapote la fesse avec compassion et retombe aussitôt dans les limbes.
1h 40. Je songe à mes prochaines vacances estivales en Irlande. Le calme s’installe un peu. Tiens, je vais compter des moutons. Un, deux, trois…
2 h 08. ….deux cents dix, deux cents onze…L’enclos déborde. La bergère en moi désespère et capitule. Je me mets soudainement à calculer le nombre d’heures qui me séparent de l’aube. J’angoisse.
2 h 25. Mes yeux semblent inexorablement attirés par les chiffres rouges et menaçants de mon réveil. Je ferme les yeux pour les chasser de ma vue. Mes doigts empoignent le matelas. J’entends les grains de sable qui s’écoulent du sablier. À moins que ce ne soit plutôt le son d’un rongeur qui use ses dents sur un deux par quatre? Tous mes sens disjonctent. Je me sens prise en souricière, menottée par un surplus d’énergie malsaine.
15 h 00. Je hisse le drapeau blanc et quitte ce lit maudit. J’ouvre le téléviseur et zappe. Des milliers d’images aussi incompréhensibles que surprenantes défilent alors devant mes yeux cernés: celles de jeunes femmes aux seins volumineux habillées en fillette. Celles de charlatans nous priant de composer le numéro au bas de l’écran pour trouver enfin le bonheur. Sur une autre chaîne, des images de Japonais affligés me glacent le sang. Mon lit me manque tout à coup.

Et là, mes yeux se posent sur ma nouvelle revue Châtelaine sur la table à café. Et je pense à Anne Marie Lecompte, une talentueuse et vibrante journaliste dont le fils s’est suicidé en novembre dernier. Dans l’édition d’avril, elle nous livre un texte poignant et coup de poing. Un cri du cœur. Son texte, intitulé Parti sans bruit, est profondément troublant. J’ai tant pleuré en le lisant. Il est empreint de vérité. À tous les pères et mères de ce monde : trouvez un moyen de mettre la main sur cet article. Car peut-être pleurerez-vous de tristesse en le lisant, mais ce pourrait bien être aussi de soulagement lorsque vous serrerez vos enfants dans vos bras…

Mes petits bobos sont soudainement bien petits et anodins. J’ai alors gravi les marches rapidement, je suis allée embrasser tendrement mes deux petites merveilles du monde, je me suis glissée contre l’amour de ma vie, et j’ai rejoint doucement les bras de Morphée….vers 5h00.


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